« Auguste » THIREL (1852-1918) et « Séverine » JOUY (1856-1947) vivent dans la 46e maison rue de Dampierre, hameau de Chennevières, à Blévy (Eure-et-Loir). Ladite commune est aujourd'hui un des trois bourgs de celle de Maillebois. Ils sont mariés depuis 10 ans et exercent comme cultivateurs-journaliers dans le hameau, comme les frères et sœurs Thirel et leurs conjoints.
En ce mois de janvier 1886, l’hiver est moins rigoureux que celui de l’an passé qui avait couvert la plaine de neige et au cours duquel de violentes tempêtes avaient sévi. Séverine sait que la délivrance est proche et, avec Auguste son époux, ils sont un peu inquiets. En effet, voilà deux ans, Séverine a accouché d’un enfant mort-né. Si on est encore habitué à la mort des enfants en bas-âge à cette époque, la mise au monde d’un enfant mort-né n'en est pas moins traumatisante.
Auguste a été chercher sa sœur aînée « Anastasie » pour assister Séverine dans l’enfantement. Avec l’époux de cette dernière, ils aident comme ils peuvent en attendant la naissance. Heureusement, l’accouchement se passe bien et c’est à midi, ce 19 janvier 1886, que vient au monde un bébé qui promet d’être grand si l’on en croit sa taille de naissance.
Le temps de s’occuper du nouveau-né, de l’accouchée, de se restaurer un peu, et Auguste, assisté de son beau-frère Pierre Loiseleur, s’en va à la mairie de Blévy déclarer la naissance. Le père, selon l’expression consacrée, "impose" son propre prénom comme premier prénom à l'enfant, mais il sait déjà que c’est le second prénom, Henri, qui sera celui d’usage.
La vie reprend vite son cours, les travaux des champs n’attendent pas, et le bébé grandit bien. Séverine reçoit le soutien de ses belles-sœurs, qui vivent dans le hameau et ses sœurs viennent de temps en temps lui rendre visite depuis Senonches. Henri est bien entouré et il joue fréquemment, parmi la vingtaine de cousins qui vivent à proximité, avec ceux de son âge.
Il n’a que 5 ans quand ses parents, qui aspirent à sortir de leur statut de journaliers, décident de quitter le hameau où réside une bonne partie de la famille pour aller tenter l’aventure ailleurs. Ils ont en effet hérité tous les deux de quelques arpents de terres au décès de leurs pères respectifs. Ils les revendent pour se constituer un pécule et s’en vont s’installer au hameau de Morvillette, à Saulnières.
C’est donc là qu’Henri rentre à l’école où il montre rapidement des capacités. Auguste et Séverine veulent le meilleur pour celui qui sera leur fils unique et ils le poussent jusqu’au certificat d’études primaires.
Vient alors le moment de choisir un métier. Quand il a 15 ans, en 1901, Henri travaille comme ouvrier charron chez ses parents, devenus cultivateurs-fermiers. Cette première expérience le conforte dans son choix et, cinq ans plus tard, il prend son avenir en mains en devenant ouvrier charron chez Georges Rossard à Marville-les-Bois, chez qui il réside.
Comme tous les jeunes de sa classe, la « 1906 », Henri procède aux formalités du recensement. Le « bébé » a bien grandi et frise même les 1m80. Cheveux et sourcils châtains clairs, yeux bleus, Henri est un beau jeune homme.
Matricule n°133, il est incorporé au 31e régiment d'Artillerie à compter du 7 octobre 1907, comme 2e canonnier-servant, puis maître-pointeur à partir du 5 octobre 1908. À l'issue des deux années de service militaire, il est « renvoyé dans la disponibilité » le 25 septembre 1909 avec un certificat de bonne conduite et passe dans la réserve.
Durant cette période de service militaire, ses parents, Auguste et Séverine, ont poursuivi leurs projets. L’expérience réussie à Saulnières leur a même permis d’acquérir une ferme, au n°24 rue grande à Tréon où ils sont maintenant agriculteurs-propriétaires. Durant ses permissions, c’est là qu’Henri vient passer du bon temps avec les jeunes de son âge.
C’est ainsi qu’il remarque une jolie jeune fille du village voisin d’Aunay-sous-Crécy, Madeleine JUMELLE (1891-1973), fille d'Edgar et Mélanie Grandon, également cultivateurs-propriétaires. Du haut de ses 1m72, Madeleine ne tarde pas à conquérir « le coeur du jeune-homme ». Et Il ne faut pas attendre longtemps pour que les deux tourtereaux décident de se prendre pour mari et femme. Henri et Madeleine ont respectivement 24 et 19 ans et c’est le 19 avril 1910, dans le « village de la jeune fille », que sont célébrées les noces.
Si le père de la mariée, Edgar Jumelle, est maire de la commune, c'est son adjoint qui célèbre les noces. Les témoins, du côté de la mariée sont Jean Amédée Beauvais, cousin-germain par alliance de son père et Robert Jumelle, son frère. Ceux de l'époux sont Louis Jouy et Léon Thirel ses oncles maternel et paternel. Un contrat de mariage a été passé, quelques jours auparavant chez Maître Baffet, à Dreux et la fête de mariage peut se passer dans les meilleures conditions dans la ferme Jumelle à Aunay-sous-Crécy.
Le couple, après le mariage, élit domicile à Breteuil-sur-Iton, dans l'Eure, route de Conches. C’est là, en effet, qu’Henri vient de reprendre l’entreprise de charronnage et forge Lefebvre et Colas, route de Conches.
La forge et la maison d’habitation donnent sur deux rues, la route de Conches (maintenant devenue rue Clemenceau en cette partie) et la rue Clologe. Côté route de Conches, à droite de « l’épicerie - mercerie - restaurant - café » se trouve la façade principale de la forge et, dans la continuité, la maison d’habitation. Côté rue Clologe, l’entreprise dispose d'une autre entrée pour rentrer et stocker matériaux et travaux en cours.
Sur la première photo on distingue nettement les charrues devant la forge et, sur la seconde à gauche de la maison d'habitation, on aperçoit un bras de charrue qui a échappé à l'attention du photographe.
Tout se présente sous les meilleurs auspices pour Henri et Madeleine. Quelques mois après les noces, au début de l’été 1910, Madeleine est enceinte pour le plus grand bonheur d'Henri. André Thirel (1911-1994), mon père, naît une semaine avant les noces de coton de ses parents, le 12 avril 1911.
Le bébé se porte bien et fait l'objet de la plus grande attention. Bien que résidant à Breteuil-sur-Iton, dans l’Eure, le couple maintient des liens très serrés avec leurs familles à Tréon, Aunay-sous-Crécy et Blévy. Dès qu’ils le peuvent, ils font la route pour partager un repas ou une après-midi.
Ils ne ratent pas non plus les événements familiaux, comme le mariage de Georgette Thirel, cousine germaine d'Henri, à Blévy en 1913. Trois générations sont ainsi réunies, avec Henri, son père et son fils.
Malheureusement, vous pouvez imaginer la suite... Le décret de mobilisation générale du 1er août 1914 vient briser cette vie qui débutait pourtant bien. Henri est rappelé et affecté au 22e régiment d'artillerie de Versailles. Le bonheur aura été de courte durée et, maintenant, Madeleine se retrouve seule à Breteuil-sur-Iton.
Nous poursuivrons, dans une prochaine série d'articles que nous vous invitions à suivre, la vie d'Henri Thirel.
Le Récit-de-vie
Il s'agit, dans un article unique, ou bien dans une suite d'articles, de raconter en la contextualisant, la vie d'un ancêtre, d'un collatéral, d'une famille, voire même d'un village ou d'une paroisse.
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